RENCONTRE NORD-SUD
- Clara Fuchs
- 1 janv. 2020
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 juin 2024
DE L’INFLUENCE DES LIGNES SCANDINAVES
01 JANVIER 2020 | CLARA FUCHS
Certains disent que le hasard n’existe pas, et qu’il n’y a que la force de la curiosité - la curiosité, c’est bien elle qui m’a amenée à pousser la porte de l’Hôtel de Gallifet en ce dernier jour de décembre.
Il y a des lieux comme ça, dans lesquels plane une douceur de vivre perceptible au premier regard. Au cœur du vieux quartier Mazarin, sous la lumière si caractéristique d’un hiver méditerranéen, se joue la rencontre du vieil hôtel particulier aixois avec les lignes pures du design scandinave..
L'endroit est généreux – quatre espaces de vie se partageant tomettes anciennes et parquet en point de Hongrie. Le choix des pièces, judicieux. Il émane de cet appartement reconstitué une élégante simplicité. Eero Saarinen, Arne Jacobsen, Børge Mogensen, Johannes Andersen, mais aussi Charlotte Perriand, Florence Knoll – autant de grands noms du design qui dialoguent sous les moulures blanches.
DORMIR
Couleurs vives, lignes rondes… La chambre reflète la vitalité d’un printemps qui s’anime. Vert forêt, jaune citron, rouge sang, bois de chêne, noyer, tissage, velours. Derrière un paravent, deux fauteuils Eva.
Fervent défenseur de la simplicité, ce Bruno Mathsson. Chercheur acharné de l’élégance dans la forme, toujours au plus près des courbes des corps. Eva, souligné par une peau de mouton gris orage nonchalamment jetée sur ses bras repliés, est une ode à la fluidité. Une silhouette fine, cambrée, à la fois tendue et dénuée de rigidité, s’habille d’une robe de cuir épais. Subtilement révélée sous ces lanière fauves entrelacées, Eva est étonnante de modernité.
RECEVOIR
Une brèche dans la paroi blanche s’ouvre sur une pièce aux influences d’ici et d’ailleurs, où dialoguent les époques dans une douce palette de brun, d’ocre, d’écru et de gris. Une atmosphère chaleureuse, calme – pour recevoir, pour s’amuser, pour lire ou flâner.
Au centre, trône une sublime table signée par le français Nicolas Bremond. Une table, ou plutôt une composition de cinq croissants assemblés. À l’image d’une lune aux reflets de miel dont la course traverserait la pièce en silence. Les maillons se succèdent et soulignent avec rondeur les veines linéaires du bois massif.
TRAVAILLER
Face au salon, découpée derrière le mur blanc interrompu, la bibliothèque signée Morgensen s’anime de céramiques Buffile aux couleurs acidulées. Vasque réglisse, jarre mandarine, coupe crème, vase menthe se multiplient sur les tablettes de bois pour créer un tableau dynamique en trois dimensions.
À l’angle de la pièce, Orion, juchée sur sa structure d’acier, jette le motif de ses écailles sur la paroi. Un bourgeon d’aluminium sur le point de s’effeuiller, prêt à dévoiler son cœur lumineux. Mercure, Vénus, Betelgeuse… Une série dont les noms d’étoile laissent rêveur.
DÎNER
L’atmosphère feutrée des salons se dissipe dans l’éclatante luminosité de la salle-à-manger. Le monumental plateau de bouleau brillant de l’emblématique table Ellipse diffuse les derniers rayons de soleil dans toute la pièce – un immense miroir de bois dans lequel les dorures des plafonds se devinent.
Les tonalités pastel des pièces précédentes sont déjà effacées par le bleu roi puissant qui recouvre les iconiques fauteuils Swan. Des taches électriques sculpturales, tout en courbe, comme une feuille de tissu sur le point de s’envoler par les hautes fenêtres ouvertes.
En redonnant à cette bastide sa fonction originelle de foyer le temps d’un hiver, c’est un sublime hommage à l’art d’habiter qui nous est proposé. Avec beaucoup de subtilité et de douceur, la galeriste Charoline Olofgörs propose ici de transcender les géographies et les dernières décennies pour découvrir – ou redécouvrir – les classiques d’une esthétique qui continue d’inspirer les plus grands créateurs.
Exposition « Inspirations scandinaves »
Hôtel de Gallifet, Aix-en-Provence | 09 novembre 2019 - 02 février 2020
